Les Terriers.
Les combats d'animaux.
Les combats de chiens .
Naissance de l' Américain Staff .

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Origines de l' Americain Staffordshire Terrier.

Les Terriers. Les " rat-killing matches "
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Parmi les mutations qui peuvent survenir dans la race canine, deux sont bien connues des éleveurs et ont permis des transformations fort utiles à l' homme. Elles portent sur la croissance et la perturbent de deux manières : dans le premier cas, l'animal est parfaitement normal, harmonieusement proportionné, mais bien plus petit que ce qui est de règle dans sa race ; dans le deuxième cas, le chien présente un raccourcissement des membres important qui pourtant n'affecte pas le reste de sa morphologie, parfois très puissante. Diverses combinaisons de ces deux mutations, plus le jeu normal sur la taille, ont donné naissance à une vaste gamme de chiens, dont font partie les Terriers.
Ceux-ci ont une double origine. Les chiens de chasse à courre avaient besoin d'être secondés par d'autres races pour s'adapter à des proies habituées à se dissimuler sous terre, notamment le renard qui devint le gibier d'élection après la disparition du loup et la raréfaction des cerfs et des sangliers qui marquèrent le XVIIIe siècle. Mais il y avait aussi le blaireau et, dans une moindre mesure, la loutre. Il fallait pour cela un chien de petite taille, apte à suivre la proie jusque dans son repaire, mais aussi combatif, courageux et acharné, pour la forcer à sortir ou même pour l'affronter sous terre.

En outre, à cette époque, il était dans les tâches des chiens de ferme de défendre le bien de leur maître contre différents prédateurs, qui s'en prenaient aux poulaillers, aux clapiers, aux oies, aux canards... Au premier rang de ceux-ci on trouvait, bien sûr, le renard, mais il ne faut pas non plus oublier les divers mustélidés, bien plus fréquents à l'époque : fouines, martres, hermines, etc. Ces chiens étaient, en outre, chargés de s'en prendre aux divers rongeurs parasites destructeurs de stocks : souris, campagnols et, surtout, rats. Leur taille était plus réduite, adaptée à leurs proies et à l'agilité et la vitesse qu'exigeait cet exercice.
Leur caractère était vif, ardent, intrépide.



De la combinaison de tous ces facteurs naquirent les Terriers, dont il existait bien entendu une très grande variété, quasiment chaque région étant caractérisée par une race particulière ; il est d'ailleurs fait mention de ce type de chien très tôt dans la littérature, puisque Gaston Phébus en parle dès le XIVe siècle. La Grande-Bretagne présente pour nous un intérêt particulier, puisqu'elle est le berceau de la race et que les Terrars y sont mentionnés dès 1570 (dans un ouvrage intitulé De Canibus Britannicis). Il s'y développa vers la fin du XVIIIe siècle et surtout pendant le XIXe une pratique qui influa notablement sur le développement des Terriers : ce furent les rat-killing matches, ou concours de chasse au rat.
Ces concours, qui ne furent jamais interdits, contrairement à d'autres combats dont nous parlons plus loin, existent encore aujourd'hui dans certaines régions des États-Unis. Les règles, définies localement, varient autour d'un thème unique : tuer le plus de rats possible dans un temps minimum. Cela allait de l'Airedale qu'on lançait aux trousses d'un rat lâché dans l'eau à de petites arènes en planches (les fameux pits), pleines de rats, où l'on lançait un Terrier en prenant soigneusement note de son rendement. Tout cela n'allait jamais sans d'abondantes libations, accompagnées de paris, d'altercations, de fumée et de rires, et d'impressionnants records furent consignés au cours de certains de ces rat-killing matches. Ainsi G. Audisio di Somma cite, dans son ouvrage intitulé Les Terriers, le chien Billy, qui tua cent rats en six minutes et treize secondes un jour de 1823, et son congénère Jacko qui réussit lui à en détruire mille en l'espace d'une heure quarante !
Ces exercices, en l'absence d'une cynologie officielle codifiée, contribuèrent à rehausser la combativité et la vitesse des chiens qui y étaient engagés, d'autant qu'il y avait derrière des enjeux financiers non négligeables.



Les combats d'animaux : le " Bull-baiting "
Les combats contre les rats étaient sans doute les moins barbares des combats impliquant des chiens. Ceux-ci étaient en effet opposés à toutes sortes d'animaux, et, notamment en Angleterre, à des taureaux ; on sélectionna pour cela des chiens (on n'ose pas vraiment parler de race) qui prirent le nom de Bull-Dogs (« chiens à taureaux »). Quatre siècles av. J.-C., un empereur romain mentionne déjà « le chien britannique qui est capable d'amener au sol le front du taureau ». On pense que les ancêtres du Bull-Dog actuel dérivaient de molosses répandus en Grèce et importés par des marchands phéniciens.
Toujours est-il que la tradition des combats entre chiens et taureaux (le Bull-baiting) est profondément enracinée dans l'histoire de l'Angleterre. On en trouve de nombreuses traces écrites dès . le XIe siècle, et plusieurs auteurs ont rapporté qu'en 1559, la reine Elisabeth offrit à l'ambassadeur de France un splendide repas à la suite duquel furent organisés plusieurs combats entre chiens, ours et taureaux. En 1618, le roi James Ier interdit ces combats le dimanche, pour des raisons religieuses, mais il en régalait ses invités les autres jours de la semaine... Au cours d'une réception pour l'ambassadeur d'Espagne, il a même été rapporté que le point culminant du spectacle fut le lâcher dans la Tamise d'un ours blanc et sa mise à mort dans l'eau par une meute de chiens...
Des anecdotes d'une étonnante cruauté ont été rapportées sur ces combats. Ils se déroulaient de la manière suivante : le taureau était attaché par un lourd collier en cuir et une chaîne d'environ cinq mètres à un anneau fixé à un pieu.' Les chiens, eux, étaient libres et s'efforçaient de saisir la gorge de l'animal, qui, bien évidemment, baissait la tête et empalait tout ce qui passait à sa portée. Les chiens trop lents ou maladroits étaient projetés sans effort à dix ou vingt mètres, leurs propriétaires s'efforçant de les rattraper au vol pour ne pas qu'ils se blessent davantage dans leur chute.
Une fois le cou saisi dans ses mâchoires, le chien ne devait plus le lâcher ; d'où le prognathisme des Bull-dogs (mâchoire inférieure en avant) qui leur permettait de respirer tout en gardant la prise. Les chiens étaient envoyés les uns après les autres (il fallait payer pour participer), et le vainqueur était celui qui parvenait à terrasser le taureau ; là aussi les récompenses financières étaient loin d'être négligeables.
Le courage et l'acharnement de ces chiens étaient véritablement stupéfiants. Ainsi de nombreux éleveurs poussaient leurs chiens mortellement blessés à tenter un dernier assaut avant de s'effondrer. Un éleveur dont la chienne vieillissante venait d'avoir une portée la conduisit au combat et entreprit de la découper en morceaux, à l'aide d'un couteau de boucher, une fois qu'elle eut assuré sa prise : la chienne ne relâcha son étreinte que quand elle mourut de ses blessures. L'heureux éleveur put vendre la portée - ainsi certifiée de bonne qualité - pour la somme astronomique de cinq guinées par chiot. On espère pour lui qu'il passa une nuit agréable...



Les combats de chiens
Mais les combats impliquant des taureaux perdirent de leur popularité et de leur importance au début du XIXe siècle, en particulier grâce à l'action de divers groupes militant contre la cruauté envers les animaux. (Et aussi de par le puritanisme de l'époque). Une loi interdisant les blood sports (« sports de sang ») fut promulguée en 1835, après des années de polémiques. Elle eut pour effet paradoxal d'accélérer l'extension des combats de chiens qu'on observait déjà depuis quelques décennies.
Ceux-ci étaient en effet bien plus faciles à organiser clandestinement que les affrontements avec des ours ou des taureaux : de toutes petites arènes suffisaient, qu'on pouvait installer dans des caves, des arrière-salles de pubs, sur des champs de foire, etc. Et où l'on pouvait tout aussi bien boire, jurer, parier, et passer son dimanche après-midi.
Les Bulldogs, cependant, n'étaient pas très adaptés à ce type de combat. Des auteurs signalent que, même face aux taureaux, leur imposante corpulence finissait par dégénérer en lourdeur et qu'il leur manquait parfois - malgré leur force et leur courage - un peu d'allant. Cela devint manifeste dans les combats de chien, où la vivacité et la vitesse prirent une très grande importance (n'oublions pas que le taureau était attaché...).
Les éleveurs réagirent quasiment tous de la même façon à cette évolution : ils croisèrent leurs Bulldogs avec des Terriers, pour créer des chiens de combat intrépides et implacables, mais aussi agiles, vifs et intelligents au combat. Ces chiens étaient des bâtards d'une très grande variété de formes et de dimensions, car les terriers utilisés n'étaient pas toujours les mêmes (Fox, Black and Tan, English White, Irish...), et les Bulldogs étaient eux-mêmes très hétérogènes. Ils prirent le nom générique de Bull and Terrier (et aussi quantité d'autres noms : Halfand Haïf, Pit Bull, Pit Dog, etc.). et firent la preuve qu'ils étaient des combattants extraordinaires. Nombre d'entre eux entrèrent dans la légende, comme celui évoqué dans un article du Sporting Magazine de 1803 : « On le connaissait sous le nom de Belcher ; il avait combattu à cent quatre reprises et n'avait jamais été vaincu. Un pedigree plus martial ou un sang plus noble ne pouvait être invoqué par aucun membre de la gent canine. Il savait distinguer les hommes braves des lâches - fêtant les premiers et menaçant les autres. [...]. »
II semble cependant que les Bull-and-Terriers (ancêtres de tous les Terriers de type bull actuels) commencèrent à s'homogénéiser quelque peu au milieu du XIXe siècle, mais ils étaient considérés comme des chiens de combat et leurs éleveurs les gardaient éloignés des concours de beauté, réservés à des animaux qu'on jugeait plus aristocratiques. Cela prit fin en 1860 avec la création d'une nouvelle race (que l'éleveur Hinks baptisa « Bull-Terrier »), race issue des Bull-and-Terriers, mais d'une indiscutable élégance, à laquelle concourrait une robe blanche immaculée. Hinks subit de nombreux sarcasmes de la part de ses pairs qui l'accusèrent d'avoir créé un chien de salon dégénéré. Il proposa donc un combat entre sa chienne Pussy (ce qui signifie littéralement « minette ») et n'importe quel adversaire, combat que Pussy remporta haut la main, tuant son rival en moins d'une demi-heure, pour remporter dès le lendemain un concours de beauté. C'était en mai 1862. La race acquit dès ce moment droit de cité et connut une rapide extension.



Naissance de l' Américain Staff
C'est aux États-Unis que le chien qui nous occupe vit définitivement le jour. L'importance des échanges commerciaux et humains entre ce pays et l'Angleterre fit que de nombreux Bull-and-Terriers furent exportés outre-Atlantique dès le milieu du XIXe siècle. La région du Staffordshire était réputée pour produire des chiens de très bonne tenue ; mais, à l'époque, ils ne passaient pas spécialement pour une variété particulière, il s'agissait davantage d'un label de qualité. Dans la formation de l'« Américain Staff », selon certains auteurs, intervint également un chien originaire de la ville écossaise de Glasgow, le Blue Paul Terrier. Tous ces chiens furent initialement croisés et sélectionnés, là encore, pour le combat, et ils prirent le nom usuel de Pit-Bull Terriers ou de Pit-Bulls.
En 1898 le United Kennel Club, une association distincte de l'American Kennel Club qui, lui, appartient à la FCI, officialisa la race en lui donnant le nom d'American Pit-Bull Terrier, ce qui mit fin à la possibilité d'effectuer n'importe quel croisement dicté par l'inspiration du moment. Les combats continuaient néanmoins à jouer un rôle déterminant dans l'évolution de ces chiens, et cette situation se prolongea jusqu'en 1936. La race était alors très populaire aux États-Unis, le président Roosevelt en détenait plusieurs représentants, et elle était fréquemment employée dans la propagande patriotique pour symboliser le courage, la force et la fidélité.

En cette année 1936, cependant, un groupe d'éleveurs du Michigan entreprit de faire reconnaître la race par l'American Kennel Club, mettant en valeur sa stabilité, l'existence de chiens d'une très belle prestance, et leur stricte opposition aux combats de chiens. L'AKC se rendit à leurs arguments et publia le standard de cette nouvelle race qui prit le nom d'American Staffordshire Terrier.
Depuis lors coexistent donc les deux lignées : d'une part, l'« American Staff » officiel, issu d'un processus de sélection rigoureux, fondé sur la tenue d'un Livre et d'une ferme opposition (sous peine d'exclusion) à tout combat ; d'autre part, le « Pit-Bull », reconnu seulement par l'UKC, participant encore à des combats clandestins et sélectionné dans ce but, ce qui implique une hétérogénéité importante et de graves défauts de caractère.
Le croisement de l'American Staffordshire Terrier avec le « Pit-Bull » est strictement interdit depuis 1955.

 


L'American Staffordshire Terrier a donc été tenu strictement à l'écart des combats de chiens depuis plus d'un demi-siècle : c'est à présent une race de chien très adaptée à la vie de famille, produisant de bons gardiens, équilibrés, courageux et vigilants. Les problèmes de santé y sont fort rares et l'entretien du chien nécessite peu de soins.